Il y a cependant dans chacune de tes fibres une énergie qui me subjugue. Je ne crois pas que seule ta volonté y préside. Tu l'avais déjà quand tu es née. L'expliquer par l'héritage génétique serait également trop facile. Je préfère imaginer que cette énergie puise sa source dans l'expérience de la mort que tu as faite alors que tu n'avais qu'une semaine de vie. A la fin des années cinquante, une coqueluche pouvait encore expédier ad patres le plus robuste des bébés. Or, robuste, tu ne l'étais guère. Quelque chose en toi a lutté pendant plus de quinze jours et tu as fini par t'en sortir. Ce quelque chose qui a lutté, on ne peut pas savoir sa nature. Existe-t-il un désir de vivre quand on n'a qu'une semaine ? Faut-il plutôt s'en remettre à la nébuleuse du hasard ? A l'hypothétique loi de la nécessité qui ferait que tout organisme s'emploie à son développement dès qu'il naît ? Je ne sais pas. En revanche, puisque tu me l'as maintes fois répété, je sais que ta mère a veillé tes fièvres jour et nuit. Pour le meilleur et pour le pire. Surtout pour le pire.